Imaginez
la France vue du ciel. Le champ se resserre et s'oriente vers le
sud-est des Alpes. La descente continue et l'on voit apparaître, non
loin de la frontière Italienne, les sommets de la haute Provence. La
Tête de l'Estrop, la Tête de Chabrières, puis bientôt celle du
Bau. On atterri enfin dans une prairie à proximité du hameau de
Mariau, à 1400 mètres d'altitude. Pour seules traces de
civilisation, une route rudimentaire et quelques pylônes en bois.
Qui d'ailleurs se font tout petits au milieu de ces étendues d'herbe
et de roche que traversent de temps en temps les nuages, jaunes de
pollen, des pins sylvestre environnants.
(en
vrai, on est venu en voiture...)
Nous
avons monté un "village de tentes", pas de confusion, il
s'agit bien de camping sauvage. Non pas qu'il ne soit pas autorisé,
car il l'était sans doute... mais plutôt que nous préférions
l’endurance de nos mollets et cuisses au confort et à
l'ingéniosité douteuse des toilettes modernes. Quoiqu'on avait pas
vraiment le choix en réalité... Mais n'approfondissons pas le
sujet. L'audace et l'inconvenance des
mouches
lorsque la marmotte sort du terrier ne nous intéresse pas.
Nous étions là
pour les loups et pour les brebis. Surtout pour les brebis, les loups
se débrouillent très bien apparemment... n'en déplaise aux
bergers, aux éleveurs aux patous et aux brebis elles-mêmes.
La problématique du
retour du Loup en France est alambiquée. Je ne la dépeindrai pas
ici, car je considère, malgré mes lectures, nos débats et les
multiples interventions de spécialistes auxquelles nous avons eu
droit, que je n'en sais pas suffisamment. Je ne dénombrerai pas non
plus les points positifs et négatifs de la présence des troupeaux
et des meutes en alpage, car comme la si bien dit un éleveur-berger :
« quant on aime, on ne compte pas ! ».
Nous sommes là pour
cinq jours. Bénévoles ou écovolontaires, nous venons tous
d'horizons différents. Nous avions parmi nous un ex-banquier belge
fort courtois, un rugbyman ouvrier survivaliste, un ex-industriel
globe-trotteur, une décoratrice d'intérieur, un ex-vétérinaire
pyrénéen, un future ex-agent de l'ONCFS, une élue monégasque, une
cuisinière ex-prof de math picarde et officieusement guide du coin,
et deux personnes chargées du programme PastoraLoup.
Une équipe très
intéressante et riche en témoignage... de toute sorte !
Nous sommes là
essentiellement pour apporter un soutien, à la mesure de nos
moyens, au milieu pastoral. Et pendant que les technocrates décident
d'un tas de directives très importantes (qui nous dépassent
complètement !) allant du répulsif de loup dernier cri à la
façon dont le berger doit couper sa rondelle de saucisson, nous
apprenons les rudiments du métier de berger. Comment déployer ou
ranger un filet de parcage des brebis, lire une carte IGN, s'adresser
poliment à des patous (adorables et très gros chiens blancs sur lesquels tu ne
lèves pas la main de peur qu'ils la prennent pour une offrande).
Mais aussi quels sont les conditions de travail de ces
éleveurs-bergers, les conditions de vies de ces loups revenus depuis
quelques années, les limites du champ lexical d'un cadavre d'ongulé
sauvage ou grégaire... etc.
Suite à ce stage
nous serons tous envoyés dans divers alpages afin d'y apporter notre
aide, désormais plus avisée. Des chantiers en altitude qui ont
besoin de bras, à la surveillance nocturne ou diurne des troupeaux,
les chants des patous et des brebis (ces dernières ont l'avantage de
les produire par les deux bouts) ne manquent pas !
La
faune sauvage locale est timide mais se laisse admirer de temps en
temps, à l’exception de certains de la famille des Canis
lupus lupus !
A
suivre...